La technique de la liste

Andrée a un problème avec mes tenues de sport. Soit la remarque concerne un hypothétique côté "trop sexy" exprimée sous cette forme : "tu fais exprès d'attirer l’œil sur toi ! C'est bien fait pour ça non ? T'étonne pas s'il t'arrive des bricoles un jour!" Soit, comme ce matin, le problème serait plus le côté "décalé-clodo" à savoir : "Tu fais exprès de te faire juger comme folle non ? Parce que là on dirait une folle ! Tu cherches l'agression !" Elle ne voulait pas aller faire une promenade avec moi à cause de ma tenue. Sur le coup j'aurais pu réagir. Au lieu de ça j'ai cherché l'empathie dont j'avais besoin pour arriver à garder le silence et écouter ce que son coeur avait à me dire. Je trouve "la technique de la liste" efficace. Elle me permet de ne pas partir au quart de tour et de garder le contrôle de moi-même. J'ai ainsi pu la remercié de m'exprimer ses pensées. J'aurais voulu savoir comment elle se sentait à ce moment là mais c'était difficile d'oser cette question tout de même. Voici l'exercice des 10 raisons afin de se calmer et s'apporter de l'auto-empathie :

Elle me dit que j'ai l'air d'une folle et qu'il ne faut pas que je m'étonne sur j'ai des problèmes après. Pour quelles raisons me dit-elle ça ? Je vais tenter de trouver 10 raisons qui sortent complètement de mon contrôle, qui ne me concerne absolument pas pour m'oublier, ranger mon égo et me connecter à son coeur.

1. Elle a très mal dormi et souffre du manque de sommeil.
2. Elle me juge comme provocatrice car elle ne supporte pas son corps
3. Elle se sent envahie par ce mec là, ne trouve pas de coins tranquilles pour souffler et est donc très tendue.
4. Elle est triste de voir décliner la santé de Jean Daniel.
5. Dans son passé, elle a été abuser et on lui a dit que c'était à cause de ses fringues
6. Un jour, ses camarades l'ont ligoté à un arbre et jeté des cailloux parce qu'ils n'aimaient pas ses fringues.
7. Elle doute constamment de ses goûts, et lorsqu'elle est sûre de porter quelques chose que la majorité de la population aimerait, elle se sent forte; car elle a un besoin de validation; un besoin d'affirmation de soi; car son enfant intérieure a été rejeté plusieurs fois par ceux à qui elle accordait sa confiance.
8. Elle déteste le rose que je porte car il lui renvoie violemment l'image de la couleur du coucher de soleil lorsqu'un jour son grand père l'a frappé dans le jardin (celle-là est tirée par les cheveux, mais on s'en fout, le but n'est pas forcément de trouver de la cohérence).
9. Elle a passé une sale journée, se sent en colère et quémande de l'attention pour recevoir du réconfort.
10. elle vient de se fracasser le petit orteil gauche contre l'angle du mur et souffre atrocement.

Cette liste est juste une façon de se calmer sur l'instant. Si au lieu de réagir à ces réflexions : Je m'arrête, garde le silence, écoute la personne et ensuite essaie mentalement de faire cette liste, le temps que j'arrive à 10, mon "émotion de réaction" s'estompera et j'aurais de nouveau le contrôle sur moi-même. En plus de cela, ça permet de sortir de l'égocentrisme, de ne plus se voir comme victime et de se reconnecter à l'autre. Mais c'est pas toujours évident. Des croyances limitantes peuvent avoir la vie dures et nous empécher de faire cette liste. Comme la fois où j'ai été interpellé par un gars dans la rue en rentrant de la salle de sport. J'ai desuite ragé, rejeté la faute de ma colère sur lui et prit la fuite en l'ignorant. Et en en parlant à ma psy, elle m'a donné se conseil de "la liste", sur le coup je pensais que ça ne pouvait pas s'appliquer à tout. Surtout pas à des faits si imbriqués dans les codes sociétaux de ma culture  : les gars embêtent et harcèlent les filles dans la rue -->  c'est de pauvres types mal éduqués --> il faut réagir --> Je prends une photo de lui et je le "metoo" direct pour le punir. Non ! Je ne suis plus d'accord avec ça. Je n'ai aucune idée du pourquoi il s'est adressé à moi de cette façon là et je préfère refaire mon exercice de la liste pour contrôler mon jugement plutôt que d'entretenir l'idée de merde que j'avais : "enfoiré d'harceleur, à tout jamais ça va durer, faut les enfermer".

Revenons à Andrée, puisqu'on en est à exprimer les besoins qui se cachent derrière la remarque désagréable de la tenue de sport, tentons d'en énumérer quelques uns : Besoin d'acceptation de soi; besoin d'empathie; besoin d'amour; besoin de communauté; besoin de confiance; besoin de liberté; besoin d'autonomie, besoin de sécurité. Seulement dans la scène, j'ai d'abord cherché ce que je ressentais et pourquoi je le ressentais. Je contrôlais surtout ma non réaction car je ne voulais pas réagir mais plutôt l'écouter. Donc me voilà devant mon ordinateur, des jours plus tard, à lui donner de l'empathie, avant même de commencer par moi. Mais essayons désormais...

Je me suis sentie [blessée car moi j'adore ce style et j'aimerais bien partager cela avec elle], [dégoûtée qu'elle ne veuille pas marcher avec moi juste à cause de ma tenue], [humiliée (est-ce que c'est un adjectif d'interprétation?) plutôt dévalorisée, attaquée et trahie parce que j'ai besoin de liberté et d'acceptation. j'ai probablement aussi besoin de sécurité et de tact. J'ai besoin de rire, d'amusement, de fun dans ma vie et cette tenue aux têtes de mort roses me met en joie! J'ai besoin d'être qui je suis sans me soucier de ce que l'on pense de moi, donc effectivement, bien de liberté et de créativité ! J'ai aussi besoin de ne pas décevoir, si quelqu'un me dit : "oh sympas ton futal !" Je vais me sentir soulagée; car j'aurais l'impression d'être validée, ce qui est une mauvaise chose. De base, je devrais me sentir suffisamment confiante pour me trouver jolie en toute circonstances. Andrée n'est pas responsable de ces émotions, réagir à ses mots lui confère trop de pouvoir. Je ne veux pas que son mal être entache ma santé mentale et mon besoin de célébrer la vie ! Je ne veux pas lui donner tout ce pouvoir. A tous moments je peux mourir, et plus jamais je ne veux vivre autrement qu'en résonance avec mes goûts et mes ambitions.